Ceux qui entretiennent le souvenir des morts ont tenu à nous montrer leurs visages et parfois leurs rôles. Photographies de studio du début du siècle, photographie populaire et familiale plus tard.
Visages de l’absence, de la beauté, de la joie, mais aussi du défi, du dépit, de l’incompréhension. Ces portraits n’étaient pas initialement destinés à honorer la mémoire de celui qui disparaitrait. Pour l’étranger c’est la seule représentation, la seule image du disparu, mais c’est souvent une belle source d’inspiration pour l’imaginer.
L’outrage du temps efface les visages émaillés, des mains vengeresses rayent les portraits, des mots replacent dans la lignée, dans le rôle social. Les mots disent l’amour et les regrets. Les styles trahissent les époques.
Pour le photographe l’acte de création ne réside plus dans la création d’une image. Il réside plutôt dans la capacité à s’en laisser compter par les images et à en retenir les plus suggestives ou plus simplement parfois celles qui le touchent. Cela est très subjectif, c’est le regard du collectionneur qui recrée le récit et c’est au lecteur de fabriquer le sien.
Cette série entre aussi en résonance avec un projet en cours d’élaboration sur l’image des femmes à travers ma collection de photos vernaculaires.
Les photographies de cette série ont été prises principalement dans des cimetières de l’Italie, de la Drôme, dans un temple à Bangkok et dans les deux cimetières de Sète qui ont fournis la plupart des personnages.
Que la paix soit avec eux.
Pierre Grall, novembre 2019